Dans La grande errance, Suzanne Bernard nous entraîne, avec certains personnages de La Malevie, à travers des aventures picaresques, mystiques, oniriques, érotiques, sanguinaires, qui ont pour héros, au XIVe siècle, des hors-la-loi. De cette plongée en marginalité profonde surgissent d'étonnantes ligures : ainsi l'Ermite, ex-franciscain spirituel en quête d'absolu, Aymar, le jongleur errant banni des cours, le chevalier Mauduit, damné pour avoir expérimenté un traité d'amour sarrasin, la pure béguine Ameline et ses frères et sœurs hérétiques qui ont échappé au bûcher, ou encore les terribles lépreux du Domaine des Yeux Blancs qui, même entre eux, pratiquent l'exclusion. Tous ces parias, révoltés, maudits, se trouvent violemment emportés dans le souille de la grande Histoire, alors que le monde, croit-on, touche à sa fin. Quête folle des corps, des âmes, fragilité des destins, foi vive, obscures croyances, il y a tout cela dans La Grande Errance... Sans oublier les thèmes d'hier, qui nous remuent plus que jamais aujourd'hui : le renversement des valeurs, l'argent roi, la corruption de certains nantis, la mort-épidémie, la question du bien et du mal, l'amour et le concilier... Une fresque dense et brutale, d'une rigoureuse précision historique, chargée d'humanité vraie.